Eficiens x Astorya : L'assurance en effervescence, le baromètre ! - Edition mars 2023

Eficiens x Astorya : L'assurance en effervescence, le baromètre ! - Edition mars 2023

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
10 mars 2023 - 6 minutes

Ça bouge dans le microcosme de l’assurance ! Et l’innovation aux multiples visages est encore au cœur des enjeux en 2023. Afin d’analyser les tendances de fond, nous faisons appel à l’œil de Florian Graillot et aux experts d’Astorya pour vous concocter un contenu désormais incontournable : « L’assurance en effervescence, le baromètre ! »

L’œil du VC Florian Graillot

Les changements de leadership s’enchaînent à la tête des insurtechs ! Ces mouvements s’inscrivent-ils dans le cycle de vie naturel d’une startup… ou alors ne serait-ce pas plutôt un ajustement contraint pour faire face à un marché devenu soudainement plus exigeant ?

Florian Graillot

Quel est le point commun entre ELEMENT, ottonova et omnius ? Facile, nous direz-vous, ce sont trois des insurtechs allemandes les plus connues ! Vrai, certes, mais allons plus loin. Au cours des derniers mois, les trois startups ont, tour à tour, annoncé un changement de CEO. Et ce timing n’a certainement rien à voir avec une quelconque coïncidence.

Mais d’abord, intéressons-nous de plus près aux profils des nouveaux venus. Chez omnius, c’est Thomas Hauschlid, présent depuis cinq ans dans l’équipe au titre de responsable produit notamment, qui prend les rênes. Côté ottonova, la « Alan d’outre-Rhin » a aussi opté pour la promotion interne. Un actuaire, Bernhardt Brühl, est propulsé à la tête de l’entreprise.

Enfin, changement radical chez ELEMENT. Exit Christian Macht – qui a depuis quitté la société – et place à Astrid Stange. Ancienne COO et membre du comité de direction d’AXA, voici une professionnelle aguerrie qui connaît le monde de l’assurance sur le bout des doigts.

Comment interpréter cette valse – qui ne touche pas uniquement l’Allemagne, d’ailleurs ? Dans le cycle de vie d’une entreprise, il arrive naturellement que l’on doive changer de pilote à un certain stade. Les besoins évoluent selon les stades de maturité, et les compétences requises ne sont donc pas les mêmes. La première période Apple de Steve Jobs, ponctuée par son éviction dans les années 80, est à ce titre emblématique. C’est un premier point à prendre en considération, pour des startups qui ont ici entre 6 et 8 ans.

Toutefois, un autre signal doit nous interpeller. L’année 2022 a, on l’a déjà martelé à plusieurs reprises, été celle d’un retour à la réalité. Une nouvelle ère s’est ouverte pour l’insurtech, dans laquelle les investisseurs se montrent bien plus attentifs. Les notions de rentabilité et de résultats techniques prennent dès lors une importance stratégique prépondérante.

Il faut donc les bonnes personnes pour cornaquer ces entreprises dans un contexte complètement différent. Et ce sont, forcément, des individus qui maîtrisent les fondamentaux, et notamment ceux purement assurantiels. La promesse d’une révolution orchestrée uniquement via la tech a fait son temps. Aujourd’hui, le nouveau paradigme ne serait-il pas en train d’imposer une innovation sous contrôle ?

La startup du mois : Marshmallow

Voici un petit moment que l’on n’avait plus entendu parler de Marshmallow. Après avoir fait la une avec sa levée de fonds fin 2021 l’ayant propulsée au rang de licorne, l’insurtech anglaise s’est montrée très discrète. Le lancement d’un produit pour les vans au printemps dernier, voilà tout ce que l’on a eu à se mettre sous la dent côté info.

Pour autant, fuir la lumière des médias ne l’a pas empêché de tracer sa route, bien au contraire. La pépite, spécialiste de l’assurance auto, vient ainsi de ressurgir, et de quelle manière ! Marshmallow émerge en effet au 2e rang du classement FT1000, qui recense les startups affichant la croissance la plus rapide en Europe.

Dans le détail, cela donne : 94 millions € de revenus en 2021, un passage de 8 à 220 salariés et un taux de croissance annuel composé de 659,8%.

Voici donc un bon exemple démontrant que les insurtechs peuvent générer de la traction, même sur un créneau historique et hyper concurrentiel comme l’auto. Nous scruterons ainsi les prochains tours de roue de Marshmallow, mais aussi d’un Leocare en France, par exemple, avec la plus grande attention.

Le « game changer » : les assureurs à côté de la plaque sur la voiture électrique. Grand chambardement à venir ?

Un post de Nigel Walsh sur LinkedIn nous a récemment interloqués. Dans celui-ci, le M. Assurance de Google expliquait avoir récemment effectué une demande de devis en ligne pour assurer une voiture électrique. Et là, quelle ne fut pas sa surprise lorsque, dans le parcours, survint cette question : « Pouvez-vous svp préciser le prix de la batterie du véhicule ? »

Ce n’est ici pas une farce. Nous sommes en 2023, et cette anecdote, au-delà de la blague, nous indique une chose : les assureurs traditionnels semblent complètement à côté de la plaque sur le sujet du véhicule électrique. Forcément, l’enjeu est de taille car l’on ne parle pas ici d’un secteur de niche, mais de l’assurance auto de demain, un gigantesque marché au niveau mondial.

Les acteurs historiques semblent vouloir utiliser le même procédé pour couvrir un véhicule thermique et un véhicule électrique. Sauf que… tout est différent ! Munich Re a récemment dévoilé un rapport sur le sujet en soulevant des points essentiels :

  • quels sont les nouveaux risques liés au véhicule lui-même et aux potentiels nouveaux comportements de conduite ?
  • comment faire face au manque de données historiques ?
  • et quel(s) impact(s) et changement(s) sur les sinistres (importance des batteries notamment) ?

L’assurance du véhicule électrique, qui composera demain majoritairement le parc mondial, sera bâtie avant tout grâce à la technologie et la data. C’est un immense changement de paradigme qui s’annonce. Insurtechs spécialisées sur la niche et acteurs tiers (Tesla, bien sûr, mais aussi les autres constructeurs automobiles qui auront anticipé le virage) ont un boulevard qui s’ouvre devant eux. Car ils pourraient rapidement devenir les plus légitimes à assurer leurs conducteurs, tout simplement !

Une voiture électrique, c’est beaucoup de data qui vont dans les deux sens. Le constructeur va mettre à jour le logiciel d’un côté, et de l’autre utiliser la data pour la mettre au profit de l’utilisateur. Tesla est ainsi en position d’ultra force là où ils sont déployés. C’est comme s’ils avaient un expert assurance embarqué sur le siège passager en permanence pour faire la tarification. Comment un assureur traditionnel pourrait-il être compétitif ?

Francis Mahut, Dirigeant d’Eficiens et spécialiste des véhicules électriques

Les principales levées du mois dernier en Europe

Plusieurs annonces intéressantes en ce mois de février, à commencer par celle de wefox. La licorne allemande a, en effet, surpris son monde en annonçant une opération de 55 millions d’euros, sans fournir vraiment plus d’explications. Assez étrange pour l’ogre qui a levé plus d’un milliard d’euros ces deux dernières années. Et un nouveau signal qui, après les licenciements du début d’année, interroge sur la dynamique du moment au sein de la pépite.

Derrière, nous trouvons Flock, et son très joli deal de 38 millions d’euros. Sacrée success-story pour cette insurtech britannique qui avait commencé par l’assurance de… drones, avant de basculer sur les flottes commerciales.

Le mois a été animé outre-Manche (4 levées au total) et Coincover est aussi parvenu à tirer son épingle du jeu. La spécialiste des couvertures crypto a aimanté 28 millions d’euros pour se développer sur un créneau où les besoins grandissent.

Cocorico, enfin, avec Garantme qui représente fièrement la France dans ce palmarès. Avec une Série B de 15 millions d’euros, la startup qui conçoit des solutions pour les professionnels de l’immobilier affiche de solides ambitions et semble aujourd’hui clairement se démarquer sur sa niche.